Par Bernard Perrine, correspondant de la section de Photographie
Lorsque l’on évoque les « Bestiaires », on est aussitôt transporté dans les riches couleurs des enluminures des chefs-d’œuvre d’Aberdenn ou d’Ashmole. Ces « livres des natures et des animaux qui reprennent la tradition du « Physiologus », prêtent aux animaux des personnalités et des sentiments comparables à ceux des hommes afin de leur servir d’exemples. La riche iconographie de ces bestiaires témoigne de la place privilégiée qu’y tenaient les animaux. Dans ses précieux ouvrages, Michel Pastoureau (1) y décrypte la symbolique du Moyen Âge et de ses couleurs, et nous livre une étude des différentes espèces avec leurs dimensions aussi bien symboliques que religieuses. Nous sommes en effet dans des temps où règnent, plus que des mondes animaux, des mondes fantastiques ou fantasmés. Une sorte d’entrelacement d’encyclopédies animales, nimbées de légendes et de mythologies, où s’entrecroisent géants, fées, sorcières, dragons et autres licornes. Des phénix, oiseau immortel que l’on retrouve déjà chez Pline, Hérodote, Hésiope et Plutarque avant qu’avec Pierre de Beauvais il devienne symbole de la Résurrection... Des mages, des griffons, sirènes, basilics, centaures ou satyres, créatures chimériques..., mythologie du monstrueux née dans les vallées mésopotamiennes entre le Tigre et l’Euphrate. Des enluminures remplies d’animaux qui, comme le serpent à plusieurs têtes, ont, depuis les origines, traversé les civilisations et dépassé la plupart du temps les affabulations de l’art médiéval.
La photographie recense peu de réalisations qui portent nommément le titre de « Bestiaires » et celles-là touchent rarement aux symboliques mythiques liées à l’imaginaire, si ce n’est par des détournements esthétiques. Par contre, par métonymie, on pourrait trouver de nombreux bestiaires, cachés ou désignés comme tels, sous un autre vocable, dans l’œuvre des photographes. Ce sont quelques-unes de ces émergences rarement révélées que nous aimerions relever.
Consciemment ou non, des origines à nos jours, sous différents aspects, l’animal a toujours fasciné les photographes, qu’ils soient amateurs – c’est un des sujets les plus photographiés –, spécialistes (photographes animaliers), artistes, poètes, professionnels qui, au fil des ans et des évolutions techniques, nous permettent d’entrer dans l’intimité, le comportement et la beauté des animaux dans des éditions de plus en plus nombreuses ou dans les rubriques spécifiques et régulières des grands magazines.
Mais la photographie va plus loin. Fidèle au vaste champ qu’elle embrasse, c’est elle en effet qui a révélé les secrets des animaux et de leur mouvement à travers les expériences scientifiques réalisées aux États Unis par Eadweard Muybridge et en France par Étienne-Jules Marey. Dans les onze volumes de Animal locomotion (1887) et The attitudes of Animals in motion (1881), le premier analyse et démontre grâce au « zoppraxiscope » que, contrairement aux affirmations du monde de l’art, un cheval au galop décolle ses quatre sabots. Le second, médecin et physiologiste, met au point la chronophotographie pour étudier « la machine animale » en mouvement ou en vol : sa marche, sa course (2)... Des travaux qui influencèrent des artistes comme Rodin, Bouguereau, Eakins, Degas et ses danseuses, le Futurisme italien... Ils furent à l’origine de la célèbre « descente d’escalier » de 1912 de Marcel Duchamp, avant d’induire fortement la naissance de l’anthropométrie et du cinéma.
Plus avant, c’est la photographie qui nous révèlera l’existence d’une faune dont les formes dépasseront souvent les affabulations de nos riches enlumineurs.
C’est encore elle qui a et aura la mission d’immortaliser dans des bestiaires toutes ces espèces qui vont disparaître comme c’est déjà le cas pour ce Portrait de la vie sauvage en voie de disparition ou Endangered de Tim Flach (3).
Le Bestiaire imaginaire (4), qui a pour objet de révéler la présence de l’animal dans la photographie de 1850 à nos jours, réunit dans un livre, catalogue d’une exposition, une centaine de photographies d’animaux réels ou imaginaires réalisées par une quarantaine de photographes. A côté de photographies comme celles de Jeanloup Sieff, Brassai, Walker Evans, Joel Peter Witkin, Nick Brandt ou Peter Beard..., on peut aussi découvrir celles, moins connues, de Crystèle Lerisse, Marteen Wetsema, L’Empereur solitaire de Herbert G.Ponting, La Méduse et L’Ara vert de Didier Massard ou encore celles de Caroline Feyt, Charles Camberoque ou du lituanien Aleksandras Macijauskas... Dans Les Bestiaires de Montherlant, comme dans ce Bestiaire imaginaire, l’animal peut être perçu comme un mythe et le mot bestiaire qui désigne également « le gladiateur » fait rêver et terrorise à la fois. Il place l’animal « entre réel et imaginaire car il est au cœur des croyances, des contes et des légendes, mais aussi de la vie domestique et de notre univers ». Il rappelle le livre des êtres imaginaires de Jorge Luis Borges, entre chimère et imagination. La photographie y dévoile à sa manière la singulière étrangeté du bestiaire.
Et que dire de Fauna (5), cet autre bestiaire imaginaire, réalisé entre 1985 et 1989 par Joan Fontcuberta, jeune photographe catalan, dans une Espagne tout juste libérée du joug de la dictature franquiste. Son photomontage, Cargol treu banya (L’escargot sort ses cornes ou Hommage à Topor), pourrait synthétiser toutes ces chimères hybrides, entre fascination et monstruosité, qui composent cette œuvre.
Son bestiaire met en scène des imitations de démarches scientifiques qui sont fausses, pour dénoncer la manipulation cachée sous les images. Un bestiaire fantastique totalement inconnu : Solenoglypha Polypodida,Tamil Nadu, (Inde), photo du serpent vertébré à 12 pattes, Cercopithecus Icarocomu (forêt brésilienne d’Amazonie), photographie noir et blanc du singe unicome volant, animal sacré des indigènes Nygala-teb, Felix Penatus, squelette du félin ailé, vestiges osseux découverts en 1932 dans une caverne du Grand Atlas (Maroc ). La seule chose vraie c’est que « c’est un miroir de la photographie moderne et de l’esthétique documentaire régnant au cours des années 1930 et 1940 »
« On peut dire que Fontcuberta se sert de la fiction dans ses œuvres pour prévenir le spectateur de son omniprésence dans la réalité, qu’il joue donc avec les règles et les conventions afin d’en repousser les limites ou de s’en libérer pour soulever un questionnement ». En ce sens, il n’est pas étonnant qu’il déclare « qu’aujourd’hui, plus que jamais, l’artiste doit agir comme démiurge et semer le doute, détruire les certitudes, annihiler les convictions, cela afin de générer un chaos à partir duquel une nouvelle sensibilité et une nouvelle conscience peuvent être construites... »
Chez Sandy Skoglund (6) ce sont des chats, des renards, des écureuils... qui, en envahissant l’image, lui confère une fonction hallucinatoire et transforment « les rêves de la petite bourgeoisie en cauchemars ». Comme Joan Fontcuberta, elle vient questionner, à travers son design et son graphisme, la réalité photographique. Ce sont l’échafaudage intellectuel et les manipulations que suppose le produit final qui viennent interroger l’opposition entre l’être et le paraître, entre la réalité et l’artifice. La présence des animaux : Radioactive Cats (1980), Revenge of the Goldfish (1981), poissons orange en terre cuite flottant dans une chambre à coucher d’enfants bleue, Fox game, renards rouges prenant possession d’un restaurant bleu gris... est loin de constituer un bestiaire mais leur représentation vient ici questionner la condition humaine, la place qu’il reste à l’homme dans une « société artificielle, de consommation outrancière ». L’univers étouffant et claustrophobe qui se dégage de ses réalisations frappe surtout l’inconscient. Ses rêves rejoignent des thèmes chers aux surréalistes qui sont pour elle une référence.
Ces réalisations interrogent aussi la photographie et son histoire dans la mesure où « tous les spectateurs partent du principe que ce qui est photographié est bien réel, et qu’en y regardant de plus près, ils s’aperçoivent qu’ils ont été floués ».
Sans les dénommer « bestiaires », des photographes comme Frank Horvat, Bettina Rheims ou Josef Koudelka dédient leurs ouvrages aux animaux. Dans un portfolio de 18 planches publié en 1990, Animal (7) réunit les photographies d’animaux prises par Josef Koudelka pendant les années 1970-80. Et c’est même la célèbre photographie du chien du Parc de Sceaux qui sera choisie pour la couverture de la première édition d’Exils en 1988.
La démarche de Bettina Rheims (8) se veut à l’opposé puisque, sous le même titre Animal, elle regroupe les résultats d’une démarche qui a consisté à photographier entre 1982 et 1984 toute une série d’animaux empaillés. Une démarche qui, pour Michel Onfray, (9) a thématiquement partie liée à la blessure, la mort, mais sous forme d’un « bestiaire photographique noir et blanc ». Si Bettina Rheims y manie l’ambiguïté, elle propose ici une variation sur le « genre pluriséculaire de la vanité ».
Avec Karen Knorr, l’animal empaillé change de dimension. Le soliloque de l’empailleur, métier réhabilité par la poésie du texte d’Adrien Goetz (10), lui donnera un visa pour visiter les palais les plus riches. Le sanglier frôlera la plus belle commode, un combat de cerfs trouvera pour cadre le salon rouge... À partir des années 80, la photographe organise des scénographies architecturales dans lesquelles elle scénarise des animaux. Une animation lyrique de ses fictions symboliques présentées dans des lieux prestigieux comme le musée de la Chasse et de la nature à Paris qui lui passa une grande commande, le musée Carnavalet, les palais vénitiens, la villa Savoye, le musée Condé à Chantilly ou le château de Chambord. La Tate, avec des installations qu’elle décrit comme ses fables ou nouvelles fables ou India songs qui fait suite au long travail consacré aux demeures françaises de 2003 à 2008. Ses animaux évoluent dans ces sanctuaires culturels habituellement protégés de la profanation des bêtes. Une transgression proche des univers de Lewis Caroll et Angela Carter.
Avec Jean-François Spricigo (11), on aura compris que l’on n’est plus dans la représentation de l’animal ni dans l’imaginaire qu’il peut véhiculer mais, comme le suggère le titre de son ouvrage, dans son Anima. Le photographe ne nous confie-t-il pas d’ailleurs que « c’est un chien qui lui a appris la photographie ou plutôt l’âme (Anima) de la photographie ». Pour lui, comme le souligne Robert Delpire dans la préface de son ouvrage, « si l’animal n’est pas le thème unique de ses images, il est une constante dans sa quête de l’image juste, celle qui n’est pas faite pour décrire, pour illustrer un texte mais celle qui prouve un intérêt profond pour l’animal, qui exprime une empathie, une émotion ». Le bestiaire de Spricigo est hors hiérarchie, il exprime avant tout le respect pour l’animal dont l’interstice du visible se situe dans le champ de l’art « pour aller vers l’imaginaire, l’au-delà et l’imperceptible, pour les faire venir à nous, nous les offrir tels que jamais nous ne les aurions saisis ».
Quand le Belge Michel Vanden Eeckhoudt photographie des animaux, c’est aussi des humains dont il nous parle. C’est un fabuliste qui se sert des animaux pour donner sa vision du monde : « on a toujours l’air un peu crétin quand on dit : j’aime bien les animaux. Mais moi, je trouve ça très marrant de photographier les animaux »... Pour explorer ce bestiaire qui ne se nomme pas mais qui est constitué d’une bonne dizaine de livres, il a parcouru pendant plus de trente ans tous les continents, à l’affût de « scènes zoologiques cocasses, étranges, émouvantes. Il partait à la chasse aux papillons, avec ses journées de chance et ses journées désastreuses ».
Doux-Amer (12), sa dernière création, est « peuplé de chiens, beaucoup de chiens, de cochons, de singes, et de gens aussi. Loin de verser dans la mièvrerie ou la niaiserie, ces animaux-là sont graves. La plupart du temps, ils nous regardent, leurs yeux sont des miroirs et révèlent le plus profond de nous-mêmes »... Sur une image, certaines personnes se fendent la pipe et trouvent ça rigolo, d’autres vont trouver que c’est un peu tragique, un peu triste. Ça me plaît, cette ambigüité », se réjouit-il.
Né dans le Massachusetts, l’américain William Wegman se complait aussi dans ces ambiguïtés quand, à la manière des grands fabulistes il se moque de nos comportements humains à travers des portraits anthropomorphiques de chiens. Être humain, son dernier ouvrage, est une sorte de miroir facétieux qui, à travers 300 photographies et toute une lignée de braques de Weimar, nous renvoie toute l’ironie qui se dégage de la façon dont nous croyons voir notre condition d’homme. [...]
Loin de vouloir construire un « bestiaire », beaucoup de photographes ont cependant dans leur œuvre des photographies d’animaux qui, rassemblées, constitueraient le plus grand Bestiaire et le plus fabuleux (au sens de fable) jamais réalisé. On pourrait ainsi y retrouver les corbeaux (Ravens) de Masahisa Fukase excités par l’odeur de l’agonie, et son chat Sasuke, à côté de l’immense queue de baleine, la patte d’iguane des Galapagos, les grands albatros des îles Malouines et tout un cortège d’animaux qui pourraient constituer le « bestiaire Genesis » de Sebastião Salgado. Comme le fameux « chien errant » à Aomori au début de l’année 1971, les corbeaux et les oiseaux du japonais Daido Moriyama, le serpent et le chien malingre de Christer Strömholm, les lions du Kenya et les champions des salons de l’agriculture de Yann Arthus-Bertrand ou le bestiaire poétique omniprésent dans les photographies de Pentti Sammallahti...
On devrait surtout y trouver, « bestiaires » à eux seuls, les « drames du taureau », rassemblés dans tant d’ouvrages par Lucien Clergue (13). Dans ses Bestiaires, Henri de Montherlant insiste sur le rapport équivoque, de quasi-bestialité qui lie le torero et le taureau. La question n’est donc pas de savoir si la corrida dérive de la tauromachie crétoise, du culte de Mithra. Le drame mythique que l’on retrouve dans ces « bestiaires » qui ne disent pas leur nom met en lumière l’ambivalence soulignée dans l’hommage noir de Cocteau qui « dramatise à l’endroit l’envers de la beauté ». Absent de son premier ouvrage, Poesie der fotografie, le taureau mort prendra la suite des flamands morts présents dans le premier ouvrage. Plus qu’un bestiaire ils prolongent le thème de la mort omniprésent qui sous-tend l’ensemble de l’œuvre. Derrière les ouvrages en honneur des toreros (comme Ordóñes/Dominguín, El Cordobés/Curro, puis Manolete et bien sûr José Tomás), on trouve encore l’hommage sous-jacent qui est fait au taureau. Quand on ne le trouve pas directement à travers les titres des ouvrages qui lui sont consacrés. Ce quart d’heure est-il à la gloire du taureau ou du toréro, ou bien est-il « le drame du taureau » : « Toros Muertos », « Le taureau au corps » ?
Peter Beard fut l’un des premiers à alerter sur la disparition des éléphants et des rhinocéros dans le parc national Tsavo au Kenya. L’aspect graphique et poétique de The end of game (14), publié dès 1965, republié et augmenté régulièrement depuis, se veut le dernier écho du paradis d’un continent secoué par l’industrialisation. [...]
Nick Brandt alerte aussi mais son écriture est, à l’inverse des « petits carnets » de Peter Beard, monumentale. Les premiers ouvrages (15), Vivre sur cette terre, Photographies d’Afrique Orientale et L’Afrique du crépuscule, veulent dresser le portrait d’une Afrique de l’Est mythique. La photographie en gros plan, sans téléobjectif, de ces animaux, glorifie cette faune des grands seigneurs de l’Afrique de l’Est. Mais ce n’est que pour mieux attirer l’attention sur les menaces qui pèsent sur ces lions, éléphants, gorilles, guépards ou zèbres. Les ouvrages suivants Chronique d’une terre dévastée et Inherit in the dust dénoncent la déforestation massive et l’urbanisation dont les premières victimes sont les animaux. Dans ce dernier ouvrage, il réintroduit des tirages grandeur nature aux endroits où vivaient ces animaux sauvages. « Je pense sans honte que mes images idylliques et romantiques donnent une certaine vision d’une Afrique enchantée. Elles sont une élégie à un monde en train de disparaître. ». ■
1- Michel Pastoureau Bestiaires du Moyen Âge, Seuil 2011, Symboles du Moyen Âge : Animaux, végétaux, couleurs, objets, Le Léopard d’or 2012.
2- Étienne-Jules Marey (1830-1904), Le vol des oiseaux, Masson, 1890 ; Étienne-Jules Marey, Michel Frizot, Photo-Poche n°13, Actes Sud 1990 ; Chronophotographie, Michel Frizot, Nathan/Delpire 2001.
3- Tim Flach, Portraits de la vie sauvage en voie de disparition, Heredium 2017.
4- Le Bestiaire imaginaire : L’animal dans la photographie, de 1850 à nos jours, Antoine de Baecque, Skira 2010. Exposition : Palais Lumière, Évian (hiver 2010-2011).
5- John Fontcuberta, Fauna, Arte y Proyectos Editoriales 1999.
6- Sandy Skoglund, Sandy Skoglund, Paris Audiovisuel 1992.
7- Josef Koudelka, Animal, portfolio de 18 photogravures, Trois Cailloux 1990.
8- Bettina Rheims, Animal, Gina Kehayoff Verlag Munich, 1994.
9- Martine Torrens Frandji, Michel Onfray, le principe d’incandescence, Grasset 2013.
10- Le soliloque de l’empailleur, photographies de Karen Knorr, récit d’Adrien Goetz, Le promeneur 2008.
11- Jean-François Spricigo, lauréat du Prix de photographie Marc Ladreit de Lacharrière - Académie des beaux-arts 2008, Anima, La revue des deux mondes (hors série) 2009.
12- Michel Vanden Eeckhoudt (1947-2015), Doux-amer, Delpire Hors collection 2013.
13- Lucien Clergue (1934-2014), Toros muertos, Panoramas Forces Vives 1963 ; Le quart d’heure du taureau, Chêne 1998 ; Le taureau au corps, texte de Daniel Schmitt, Editec 1963.
14- Peter Beard, The end of game, Viking 1965, Tashen 2015.
15- Nick Brandt, On this earth : photographs from East Africa, Chronicle Books 2005 ; A shadow falls, Harry N. Abrams 2009 ; Across the ravaged land 2014 Harry N. Abrams ; Inherit in the dust, Edwynn Editions 2016.