Exposition "images en lutte"

La culture visuelle de l’extrême gauche en France (1968-1974).

Fruit des regards croisés de deux disciplines souvent opposées, l’histoire de l’art et l’histoire, l’exposition "Images en lutte" (21 février - 20 mai 2018, École nationale supérieure des beaux-arts de Paris. Commissaires : Philippe Artières et Éric de Chassey) proposait une lecture documentée de ce moment particulier de l’histoire contemporaine, les années 1968-1974, où l’art et le politique la création et les luttessociales et politiques, furent intimement mêlés.

 

La mémoire collective des événements de mai 68 est largement liée aux affiches produites par l’Atelier Populaire, émanation de l’occupation de l’École des Beaux-arts de Paris à partir du 14 mai par ses étudiants et ses enseignants, bientôt rejoints par de nombreux artistes.

Ces affiches témoignent bien sûr de la mobilisation en France et à travers le monde de toute une génération dans cette révolte politique du tournant des années 1960-1970 ; mais ces affiches sont aussi porteuses d’une autre histoire, loin de celles des partis politiques désireux de participer au système parlementaire, mais proche de celles des organisations d’extrême gauche interdites dès juin 1968 et qui vont se multiplier pendant plusieurs années, changeant de noms au fil des opérations de police et des scissions, jusqu’à l’auto-dissolution de la Gauche prolétarienne (GP, maoïste) le 1er novembre 1973, un mois après le coup d’État du 11 septembre 1973 au Chili.

Elles démontrent que ce soulèvement d’une génération, qui est allé jusqu’à l’épuisement des utopies dans le terrorisme, la découverte des massacres commis en leur nom en Extrême-Orient (Chine de la Révolution culturelle, Cambodge des Khmers rouges) et la possibilité de l’accession au pouvoir de la gauche de gouvernement (avec l’adoption du Programme commun par les socialistes, les communistes et les radicaux, en 1972), a partie liée avec les images et avec l’art d’avant-garde de cette époque – non sans contradictions. Elles ne sont en même temps que la partie la plus connue d’un foisonnement de la création, qui répond à une volonté de renverser radicalement les systèmes en place, dont la plupart des résultats, lorsqu’ils sont montrés aujourd’hui, le sont en mettant de côté leur signification politique, au profit d’une esthétisation réductrice. ■

Mur d’affiches à l’École des beaux-arts de Paris (1968). © Atelier Populaire, Photo DR
Mur d’affiches à l’École des beaux-arts de Paris (1968).
© Atelier Populaire, Photo DR